PNR 76

Thématiques

Connaître l’histoire de nos institutions

Etudier les pratiques et savoirs d’expertise nous plonge au cœur des institutions locales et à des aspects peu connus de leur histoire : les fonctions variées des établissements de soin et de détention, les tensions autour des mesures de placement (hôpital ou prison ?), les suivis médico-soignants en milieu carcéral ou encore les débats publics autour de la toxicomanie.

Etablissements

Remplir les missions de l’Etat social : hôpitaux psychiatriques, colonies pénitentiaires agricoles

Pendant des décennies, les institutions où sont placées les personnes expertisées ont pallié les carences des politiques sociales et de l’assistance publique. Ce rôle protecteur est assuré par une constellation interprofessionnelle : psychiatres, soignants, assistantes sociales, surveillants, aumôniers, sœurs religieuses, agents des services de patronage, responsables des établissements de détention ou des colonies agricoles.

Ferme Les Mangettes, Hôpital psychiatrique de Malévoz (VS), 1926. In François Serge et Agurtzane, Évolution chronologique des soins et structures de l’hôpital psychiatrique de Malévoz (1901-1987), Monthey, Mémoire de fin d’études, 1988.

Psychiatrie et prison

L’histoire sociale des interventions psychiatriques dans les prisons en Suisse romande est mal discernée. Au moyen de sources hétérogènes, notre étude entend faire connaître les rapports tissés entre la psychiatrie et le monde pénitentiaire. Parmi les acteurs, les médecins et les personnes condamnées ont laissé des traces écrites sur les effets psychiques de l’enfermement. Le quotidien est aussi fait de correspondances entre les institutions sur des problèmes ponctuels ou urgents. Dans l’espace public, les articles publiés dans la presse, les reportages télévisuels et les écrits militants dévoilent ce qui se passe derrière les murs.

Pénitencier de Bochuz, Plaine de l’Orbe, 1932. In : Henri Anselmier, Les prisons vaudoises (1872-1942), Lausanne, Bibliothèque historique vaudoise, 1993.
Rôle de la critique

Débats publics intenses dans les années 1970

Au cours des années 1970, l’action militante s’organise en Suisse pour mener une campagne de dénonciation contre le système carcéral. Dans l’espace public, le débat se focalise sur l’isolement et les suicides de détenu-e-s. Le soupçon pèse par ailleurs sur les usages coercitifs des médicaments psychotropes, le plus souvent distribués par les surveillants.

«La prison tue, tuons-la». «Das Gefängnis tötet – Tod dem Gefängnis!»

Slogans arborés sur les banderoles lors de manifestations en Suisse contre la prison
Six morts sur ordonnance, Lausanne : éditions d’En bas, 1982.

Genre : documenter la vie des femmes et des hommes

Le rôle joué par les qualifications psychiatriques sur la construction et la déconstruction des figures de la déviance mérite amplement d’être approfondi. Ce n’est que très récemment que la perspective genre est adoptée dans les recherches sur l’expertise.

Internements administratifs, mises sous tutelle, hospitalisations forcées, détention pénale sont des réponses institutionnalisées aux comportements qui contreviennent aux normes qui s’appliquent aux deux sexes : filiations illégitimes, négligence des obligations domestiques, prostitution, avortements illégaux, attentats à la pudeur, dilapidation des revenus dans la «boisson».